On observe une première description médicale de l'anorexie en 1689; le médecin Richard Morton décrit une forme de dépérissement physique d'origine nerveuse.
Mais c'est qu'à partir de la deuxième moitié du siècle passé que le terme d'anorexie mentale est employé dans le sens que nous lui reconnaissons aujourd'hui : presqu'en même temps, deux médecins, le français Lasègue en 1873 et l'anglais Gull en 1874, donnent les deux premières descriptions cliniques de cas d'anorexie, descriptions qui sont encore aujourd'hui d'actualité. Bien que pour ces auteurs il s'agisse d'un trouble d'origine psychique, la médecine le considérera et le traitera pendant des années plutôt comme un problème physique.
Ce n'est qu'à partir des années 50 que l'on reviendra à l'idée d'une origine psychologique de l'anorexie mentale, acceptant donc que les problèmes physiques associés ne sont que la conséquence de l'arrêt de l'alimentation.
a.Premier cas d'anorexie et interprétation
* A la fin du Moyen Age en Europe, de nombreuses femmes qui étaient surnommées les « saintes anorexiques » pratiquèrent le jeûne ; certaines étaient mises au rang des saints. Le premier cas mentionné dans l’Histoire est celui de Catherine Benincasa qui vécut au XIVe siècle (1347–1380).
Si elle venait à avaler un moindre aliment, son estomac ne lui laissait aucun repos avant qu'elle l'eût vomi. En pareil cas, elle se retirait à l'écart avec une de ses amies et se chatouillait la gorge, soit avec une tige de fenouil, soit avec une plume d'oie, jusqu'à ce qu'elle se fût débarrassée de ce qu'elle venait d'avaler.
Elle décéda à 33 ans, en ne mangeant plus et s’imposant de multiples privations et actes de contritions .
b.Autres cas historiques
- Un autre cas assez célèbre est celui d’Élisabeth de Wittelsbach, dite Sissi, l’impératrice d’Autriche-Hongrie, qui a vécu au XIXe siècle (1837–1898). A cette époque, elle était la femme la plus belle d'Europe, la plus puissante. Mais elle avait une obsession: ne pas dépasser cinquante kilos pour 1m72. Elle s'imposait donc des régimes alimentaires draconiens, se contentant que d'un seul aliment.
- Au XX ème siècle, un grand titre parait dans le Tuesday Express d'Ashford du 3 septembre 1943 pour annoncer la mort de Simone Weil, une jeune professeur de philosophie née en 1909 dont la vie entière a été consacrée aux autres et à la pensée de l'Autre. Au-delà de comportements jugés selon les cas comme pathologiques, ou mystiques, sacrificiels pour une cause, pour un peuple, pour Dieu.
- Pour ceux qui s’adonnèrent au jeûne et à de sévères restrictions alimentaires ont fréquemment justifié ces conduites par des motifs religieux ou philosophiques. Ensuite au fils des années, une apparition de la maladie semble être en lien avec la découverte du système nerveux.
C'est grâce aux précisions du médecin Richard Morton (1686) sur la "consomption nerveuse" liée, selon lui, "aux passions de l’esprit, à un zèle intempestif pour les études et d’un excès de tutelle parentale" et non plus à une crise mystique, l’anorexie mentale primaire est clairement reconnaissable trois siècles plus tard.
Pourtant, il faudra attendre le XIXème siècle pour assister à l’acte de naissance véritable de l’anorexie mentale avec des descriptions quasi simultanées en Angleterre (1868-1874) et en France (1873) sous les noms respectifs d’"anorexia nervosa" et d’"anorexie hystérique".
L'anorexie existe depuis toujours, mode ou pas mode, mannequin ou pas mannequin, elle est liée aux femmes, plus exactement aux jeunes filles qui refusent de devenir femme. Les jeunes filles anorexiques n'étaient pas traitées de la même façon selon les époques, saintes, sorcières ou folles, elles ont toujours effrayé ou fasciné. Elles représentent le refus d'une vie moyenne, de la vie quotidienne, elles représentent le désir d'autre chose.